Prendre le parti pris de faire un jeu de baston en 2D est quelque chose de très risqué aujourd'hui. En effet, cela condamne les joueurs actuels souvent habitués à
SoulCalibur ou
Tekken à se déplacer en latéral uniquement comme des petits crabes, en offrant son plus joli 3/4 profil au public en permanence. Question réalisme, on a vu mieux. Faire de la 2D, c'est aussi se priver des supers effets de caméras qui tournent autour des joueurs traveling zoom arrière 360 backslide qui donnent si bien quand votre corps brûlant plein de sueur réalise un German Souplex à son adversaire. Non, en 2D rien de tout ça. C'est un style à part et, souvent, on dit que cela correspond à une catégorie de gamers dits "old school", et que la nouvelle génération kevinesque ne pourrait pas s'y intéresser. Le souci, c'est que voici
BlazBlue. Ou comment transformer des embuches sur notre route en sérieux atouts.
The Wheel of Fate is Turning
Blazblue, c'est l'histoire de 12 personnages dont les destins se mêlent, s'entrecroisent et entrent en conflit. Tiens c'est vrai que dit comme ça, on pourrait penser aux feux de l'amour. Le mode scénario est impressionnant dans sa complexité, et les cut-scenes d'une longueur assez hallucinante. Le doublage est de bonne qualité, et pour peu qu'on ait un peu de temps devant soi (en réalité beaucoup de temps devant soi), on passe de bons moments à profiter de l'histoire. A l'évidence, le mode scénario ne correspond pas à la personnalité du joueur de baston névrosé, cherchant à terminer le jeu en perfect, moins de 48 secondes par match, super hit méga combo ultra groove à l'appui. Ici, prenez le temps de vous imprégner de l'univers. Chaque personnage peut en moyenne se frayer un chemin parmi 3 parcours différents selon ses choix. Les histoires sont sympathiques, parfois cocasses comme celle de la femme chat et de sa copine "booby lady", d'autres plus épiques et directement au centre de la trame, telles que celles de Ragna the Blood Edge et de Jin, son frère et nemesis. Le soin apporté au character design est impressionnant. Chaque protagoniste est original tout en collant aux canons du manga, possède un caractère bien trempé, une identité propre et une manière particulière de se battre. C'est à partir de ce moment que les choses deviennent intéressantes.

Guette ma technique je suis physique
On s'imaginerait volontiers que des combattants évoluant sur un seul plan auraient tendance à limiter les techniques possibles, c'est absolument l'inverse qui se produit dans
BlazBlue. Par exemple, Rachel Alucard, vampiresse qui comme Gary Coleman a bloqué sa croissance à 12 ans, manipule le vent pour ennuyer l'adversaire, pouvoir qui est tout de même un peu plus simple à manipuler sur un seul plan. Bang, le ninja surexcité vengeur, peut jeter des sorts dans le décor sur lesquels il prendra appui pour attaquer de manière inattendue. La Booby Lady, armée d'un bâton, peut le jeter à la manière d'un boomerang ou le planter dans le sol pour se balancer dessus. Carl manipule une poupée de combat, redoutable malgré son costume de mamie Nova. Si les duels peuvent paraître confus au départ, c'est ensuite avec un réel plaisir qu'on apprend à utiliser au mieux les capacités de chacun. Les personnages ont des coups traditionnels sur 3 touches, et chacun possède une touche "drive". Le "drive", c'est la capacité unique des combattants, leur atout qui les caractérise. Maîtriser les pouvoirs spéciaux vous demandera de la patience, car il faut aborder chaque adversaire d'une manière différente, en fonction de son "drive" à lui. A vous de comprendre vos points forts et faiblesses, et d'en tirer les conclusions adéquates. C'est donc une vraie petite évolution du jeu de baston 2D, en y faisant intervenir des éléments extérieurs avec lesquels il faut compter. Et puis 12 personnages, c'est un chiffre que l'on pourrait déplorer au départ., mais force est de constater que la profondeur de chacun nous réserve de longues heures de plaisir, malgré ce choix restreint.

Please Insert Coin(s)
Dans l'ensemble, c'est une vraie réussite que ce
BlazBlue : Calamity Trigger, et relever ses défauts est bien difficile. Disons qu'ils dépendent du caractère de gamer de chacun. Certains s'endormiront crispés à leur manette devant la longueur des cut-scenes, d'autres se plongeront volontiers dans l'histoire. Certains déploreront ce faible choix de personnages pendant qu'un autre catégorie de joueurs se contentera de s'extasier devant la multitude de styles de combats. Vous l'aurez compris, c'est aussi une question de tempérament. BlazBlue bouscule tranquillement une quantité de codes établis, à commencer par offrir un fond à un jeu de baston. Ce n'est pas un nouveau
Guilty Gear comme certains le prédisaient, c'est une évolution. Il n'a rien à voir avec son ancêtre, si ce n'est cette patte graphique si créative particulière à
Arc System. On en redemande, on applaudit des deux mains, et on se dit que la baston 2D a encore de beaux jours devant elle. Reste à espérer que les éditeurs en Europe s'en aperçoivent et daignent distribuer le titre chez nous.